Lisa et le métier de costumière

Une passion pour Lisa, le joli métier de Costumière ...

 

Elle est originaire de Caen, et c’est sous le soleil caennais du mois de juillet que je rencontre Lisa, avant son départ pour un petit village près d’Annecy où elle travaille sur un projet de théâtre pendant quelques semaines.

 

Lisa, peux tu me dire pourquoi ce joli métier ?

Après mon bac, je me suis inscrite à la fac, en sociologie, sans trop savoir ce que je voulais faire, j’y suis restée un an mais très vite je me suis aperçue que cela n’allait pas marcher. J’avais un copain qui participait au tournage du film sur Guillaume le Conquérant  « La jeunesse du Guillaume le Conquérant » produit par l’association Les films du Cartel. Il était bénévole sur le tournage et m’a proposé de venir filer un coup de main car ils avaient besoin de monde en costumes.

J’avais fait un tout petit peu de couture mais vraiment pas grand chose, j’y suis allée et en fait j’ai adoré, j’ai découvert les costumiers, les habilleurs … Il y avait peu de réalisations mais il y avait une grosse équipe, j’ai fait une première session avec eux puis une deuxième puis une troisième où là, j’ai remplacé la personne qui gérait le pôle costume, et cela m’a permis de rencontrer pas mal de gens dans le milieu audiovisuel caennais.

 

Cette expérience a été le « déclic » ?

Oui, j’ai complètement arrêté la socio et j’ai décidé de faire des études de costumière. Je suis partie à Cherbourg pendant un an préparer un diplôme de technicien des métiers du spectacle en habillage qui permet d’avoir les bases des techniques de couture. C’est un peu une sorte de prépa pour rentrer en Diplôme des Métiers d’Arts costumiers que j’ai fait à Toulouse en deux ans où c’est vraiment spécialisé en réalisation. On fait la couture et le patronage, un tout petit peu de conception.

Ensuite j’ai fait un an de pause pour prendre le temps de préparer le concours de l’Ensatt de Lyon pour faire costumier réalisateur en un an. J’ai fait ça l’année dernière et comme l’Ensatt est une école où il se passe plein de choses, je suis restée inscrite cette année en « post diplôme ». Cela m’a permis de suivre juste les modules qui m’intéressaient dans les autres formations de costumes, donc en coupe et en conception.

Moi ce qui m’enthousiasme le plus, c’est vraiment la réalisation, la coupe aussi ; la conception, c’est là où je suis le moins à l’aise. Cette dernière année m’a permis de faire beaucoup de stages, de commencer aussi à faire des projets à côté. J’en suis là. Je suis restée trois ans à Lyon.

 

Tu avais fait de la couture auparavant ?

Pas beaucoup, j’avais cousu un petit peu, j’avais fait un sac avec ma grand-mère, j’étais attirée par ça mais sans vraiment m’y attarder.

 

Cela a donc été une révélation ?

Oui et ce qui m’a plu surtout, c’est que  la couture ce n’est pas que de la mode mais cela peut être au service d’un spectacle. C’était la première fois que je m’éclatais dans mes études, à chaque fois que je faisais quelque chose il y avait un résultat tangible.

 

Et tu souhaites travailler dans le milieu du spectacle ?

Oui mais entre danse, théâtre, cirque, arts de rue je n’ai pas vraiment de préférence. En tant que spectatrice, je suis plus souvent attirée par les arts de rue, le monde du cirque, cela me fascine mais j’adore travailler sur des projets de cinéma ou de théâtre.

 

Tu as quelques projets ?

J’ai un premier contrat tout le mois de juillet à la suite d’un stage que j’ai fait l’an dernier, je pars à Annecy pour un projet avec quarante enfants et une équipe de vingt professionnels, nous montons un spectacle et une petite tournée dans la région Haute Savoie. C’est ma première intermittence.

Ensuite je vais devoir trouver du travail car mes projets actuels sont avec des copains, c’est la compagnie CerclhOm qui vient de se créer avec une ancienne scénographe de l’Ensatt et un circassien d’une école au Maroc où j’ai fait un stage. Ils sont en train de monter un spectacle et je travaille avec eux, nous allons avoir des résidences ensembles dans l’année, nous pourrons peut-être un jour nous payer mais pour le moment ce n’est pas ça qui fera mon intermittence. Cest donc une petite source de stress quant à l’avenir mais avec le réseau de l‘Ensatt il y a pas mal d’annonces qui tournent et le réseau est assez ouvert.

 

Tu souhaites rester sur Lyon ?

Oui j’aimerais bien, quitte à bouger mais avoir un pied à terre là-bas. C’est une ville agréable , je m’y sens bien, il y a beaucoup de choses à voir, Paris-Lyon c’est deux heures en tgv et puis ce n’est pas si loin de la Normandie.

 

 

Tu peux m’en dire un peu plus sur les stages que tu as fait ?

Pour chaque formation, il y en avait un par an obligatoire mais cette dernière année, comme je n’ai suivi que quatre modules, j’ai pu faire quatre stages, des stages plus ou moins longs, le premier je l’ai fait dans une école de cirque au Maroc, à Rabat. C’était super, ils ont une costumière mais qui est toute seule pour toute l’école, c’est quelqu’un de super efficace mais qui n’a pas une formation de costumière vraiment. J’arrivais sur un spectacle créé par deux metteurs en scène français et j’ai pu faire toute la conception avec elle, c’était une énorme responsabilité mais c’était vraiment chouette ! Je suis restée en contact avec eux, ils ont plein de projets, plein d’idées.

J’ai fait des stages avec des compagnies de théâtre sur Lyon où là c’était réalisation/coupe avec des conceptrices, ancienne de l’Ensatt.

 

Cela se passe comment ? On te commande des costumes pour une pièce ou un spectacle et tu réalises le costume ?

Oui par exemple là, pour les deux pièces de théâtre, il y avait deux conceptrices.  Elles font les dessins qu’elles nous donnent ensuite, nous faisons des recherches en volume, soit sur le mannequin, soit à plat si ce sont des formes un peu plus simples .

On fait les essayages, les retouches et on donne le costume fini mais ce sont les conceptrices qui font le dessin, qui choisissent les tissu, ce sont elles qui font les achats etc.

Par contre au Maroc, nous avons fait toutes les étapes du début jusqu’à la fin et c’est un travail aussi avec les metteurs en scène avec lesquels on discute, il y avait un vrai regard. Tous les choix de costumes ont été fait avec la costumière qui était sur place.

 

Tu ne préfères pas plutôt cela ?

J’aime bien ça mais je me sens plus à l’aise pour la réalisation, c’est surtout ce que j’ai appris. A l’Ensatt il y a également une formation de trois ans pour être concepteur, mais sans forcément une base en couture.

Je travaille avec un copain sur des clip ou des courts métrages, là il n’y a pas de problème. Sur d’autres choses, je vais le faire aussi mais je vais être moins à l’aise, sans doute parce que je l’ai moins fait. Ce que j’aimerais dans l’idéal c’est bosser avec des compagnies où cela se suit, tout le travail du dessin jusqu’à la fin. Ce qui arrive assez souvent car les compagnies n’ont pas souvent les moyens d’employer plusieurs personnes.

Le travail de concepteur cela va être aussi par exemple en cinéma de faire les achats. J’ai pas mal de copines qui ont fait des stages ou sont parties bosser dans le cinéma à Paris et il y a une grosse partie du travail qui est de faire les magasins. Moi si je ne faisais que ça, j’aurais un grand manque.

Tous les projets sont sympa et motivant et puis ce qui est chouette c’est que cela change à chaque fois, sur chaque projet c’est une nouvelle équipe, un nouveau lieu.

Le projet de juillet est avec des enfants, nous avons une cinquantaine de costumes à faire en trois semaines, nous sommes six dans l’équipe costumes/décors, donc nous faisons tout avec une chef déco et une chef costumes.

J’ai fait une spécialisation à l’Ensatt où la réalisation est au mm près, quand je suis arrivée sur ce projet cela a été une espèce de libération. On y va, on n’oublie pas que c’est du théâtre, que c’est sur scène, que ce ne sont pas des vêtements qui sont portés tous les jours et c’est génial.

J’aime autant les deux mais cela faisait du bien de se décomplexer aussi, je ne suis pas obligée de passer cent cinquante heures sur une veste. Dans les formations que j’ai faite, on t’apprend à faire les choses « pile poil », c’est parfait parce que tu acquiers une technique mais par contre en efficacité vu que l’on ne fait que de la pièce unique, on n’est pas très rapide. Cela fait du bien aussi de se confronter à la réalité et ne pas passer trois semaines sur un costume.

 

 

 

Et l’ambiance à l’Ensatt ?

C’est très sympa, il y a toutes les formation du métier donc c’est chouette. Après il y a des choses qui sont frustrantes parce qu’il n’y a que deux formations sur la dizaine qui sont en un an donc il y a des projets que l’on touche à peine du doigt.

Il y a vraiment une bonne ambiance et il y a plein de moyens, ils récupèrent les stocks d’Hermès en tissus ou des choses comme ça, c’est super parce que ce sont des tissus que l’on  ne touchera pas forcément souvent, c’est une super expérience. Autant en DMA (Diplôme des Métiers d‘Art) j’ai appris beaucoup mais c’était tellement intense comme formation que l’on a dit adieu à nos nuit, à notre vie sociale, là cela faisait du bien d’être plus détendue tout en faisant de la qualité.

 

Vous devez aller voir des spectacles ?

Oui on a plein de spectacles obligatoires. En DMA  ils nous font une programmation avec des spectacles obligatoires sur lesquels on travaille et puis à l’Ensatt, on a des tarifs qui permettent de voir beaucoup de choses. Il y a beaucoup de professionnels qui interviennent pour donner des cours et cela permet de rencontrer pas mal de monde. Nous, on est un peu moins en contact avec eux puisqu’on est souvent dans l’atelier. La plupart des formations sont des formations de concepteurs, concepteurs son, concepteurs lumières, qui sont aussi confrontés à la réalité.

 

Lorsque vous avez réalisé des costumes, êtes-vous présents pendant le spectacle ?

Cela dépend, dans les grands théâtres ce ne sont pas les mêmes personnes qui sont dans les ateliers et présentes aux représentations, ce sont les habilleuses qui vont  aider les comédiens à passer les costumes, qui font l’entretien, qui vont retoucher si besoin. Une fois que le costume est sorti de l’atelier, nous on n’y touche plus tandis que pour les petites compagnies c’est parfois différent.

 

A t’écouter, c’est vraiment un métier passionnant.

Pendant toute notre formation on nous disait : touchez votre tissu, apprenez à écouter ce qu’il vous dit . Au début cela ne te parle pas du tout et c’est vrai que petit à petit il y a ce contact sensuel avec le tissu, c’est assez passionnant.

Ce qui est bien aussi avec l’Ensatt c’est qu’ils font des partenariats avec des écoles à l’étranger et il y a beaucoup de choses qui se font, là j’ai deux copines qui sont au Mexique, il y a un projet avec le Bénin, une école à Shangaï, une autre au Liban

Il y a deux Ensatt en France, des écoles publiques qui proposent d’autres formations que celles d’acteur, il y a Strasbourg où ils proposent une formation de costumier scénographe.

C’est un métier qui peut être difficile mais c’est tellement important de s’éclater dans ce qu’on fait, ce n’est pas toujours facile parce que l’on nous met tellement la pression pour trouver notre « voie » . Moi si je n’avais pas eu ce copain !!! Ce sont souvent les rencontres qui font que .

 

Merci Lisa pour cette belle rencontre, je te souhaite de t’épanouir pleinement dans ce que tu fais et je constate que tu es sur la bonne voie, je te souhaite également de trouver plein de projet pour pouvoir vivre de ce joli métier.

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Par Maryline Bart, le .

Crédits

Lisa Paris