Rencontre avec Luq Hamett

Le succès dans de multiples voies

 

Si je vous dis Jason Priestley (Brandon dans Beverly Hills), Mickaël J. Fox (Marty Mc Fly), Roger Rabbit, vous devinez le lien entre ces trois personnages. La voix, celle de Luq Hamett (il en a des dizaines d’autres à son actif) doubleur, comédien, metteur en scène, directeur de théâtre, que nous avons le plaisir de retrouver tout prêt du charmant théâtre qu’il a repris en 2014, pour nous raconter son parcours.  De quoi alimenter une sympathique conversation car, comme il l’avoue lui-même, il est très bavard.

 

Si nous commencions par l’histoire de ce très joli théâtre.

En 2014 par un hasard, j’ai appris que le Café d’Edgar et le Théâtre d’Edgar étaient à vendre, et au bout d’un an j’en suis devenu le nouveau propriétaire  J’ai fait quatre cent mille euros de travaux, j’ai cassé le mur entre le café et le théâtre et j’en ai fait ce théâtre de huit mètres d’ouverture et de cent trente places.

C’était un haut lieu, c’est le berceau du café théâtre à Paris, il y a deux endroits où ont été créés le café théâtre, ici et au Café de la Gare avec Coluche. Ce sont les deux endroits où après 68, il était possible de faire autre chose que du théâtre bourgeois, les prémices du café théâtre et ce lieu a été créé à ce moment là. Ici ont démarré tous les humoristes qui sont devenus célèbres, Michèle Bernier, Sylvie Joly, Popeck, Chevalier/Laspallès, Les Wamps ont débuté ici. Coluche y a fait sa première mise en scène avec Charlotte de Turckeim. Beaucoup de gens ont fait leurs premiers pas dans ce théâtre.

J’ai donc racheté le théâtre pour en faire un théâtre privé au même titre que le Théâtre du Monparnasse, que La Gaité, que le Théâtre Rive Gauche et je fais partie de l’Association au Soutien des Théâtres Privés (l’ASTP). C’est un gage de qualité mais cela m’impose aussi des règles, les pièces ici sont diffusées toute la semaine. je n’ai pas à l’affiche vingt spectacles comme dans beaucoup d’endroits où l’on en joue un le jeudi, un autre le mardi … Il y a une vraie programmation théâtrale, ce sont des spectacles de qualité et je suis assez fier de constater que les pièces qui démarrent chez moi tiennent longtemps, le minimum que j’ai eu est cinq mois.

La direction de théâtre représente beaucoup de travail, il y a la gestion des pièces en cours dont il faut faire la promotion, assurer la représentation, gérer les comédiens, la recherche des prochains spectacles. Beaucoup de travail de gestion, d’administration, les rapports avec les sociétés d’auteurs, un théâtre emploie finalement beaucoup de monde, des auteurs, des metteurs en scène, des comédiens…

Je programme aussi régulièrement des pièces pour enfants, actuellement il y a «Le royaume des chansons» une comédie musicale pour toute la famille qui se joue les samedis et les dimanches, et pendant toutes les vacances scolaires, cela remporte aussi un beau succès. C’est une belle représentation, les acteurs chantent, dansent, ce sont les contes de notre enfance revisités. Par exemple vous avez «Savez vous planter les choux» en rap, toutes les comptines qu’on connait sont revisitées avec des musiques d’aujourd’hui. Cela plait aux parents et aux enfants.

 

Comment choisissez-vous les spectacles ?

Tout commence par le texte, je lis les pièces et puis pour celles qui me plaisent, je commence à imaginer une distribution et j’appelle des comédiens. Si je veux faire la mise en scène moi-même, je ne cherche pas de metteur en scène. En général dans le théâtre, je ne mets qu’une seule pièce en scène, je ne suis pas sur tous les fronts car ce serait contre productif.

 

Vous pouvez nous parler d’une des pièces à l’affiche «La croisière ça use» que nous avons eu le plaisir de voir et d’ apprécier.

«La croisière ça use !» est une pièce que ma femme a écrite, c’est certes ma femme mais je ne monte pas de pièces auxquelles je ne crois pas. J’ai trouvé l’idée géniale, cela fait vingt huit ans que l’on partage notre vie donc nous avons forcément des envies et des goûts communs. C’est de la comédie contemporaine, actuelle, on ne se prend pas la tête. Ce sont des personnages très différents qui se retrouvent bloqués au même endroit, c’est tout ce que j’aime, de la comédie française comme il y en avait dans les années 70/80.

On nous fait l’honneur de temps en temps de comparer cette pièce  à l’équipe du Splendide. On ne peut pas me faire plus plaisir parce que moi je suis un fan des «Bronzés», fan du «Père noël est une ordure», du cinéma de Francis Weber, avec qui j’ai eu la chance de tourner car j’ai fait un joli rôle dans « Le placard« . J’ai eu le plaisir de tourner avec Daniel Auteuil, Gérard Depardieu et notre regretté Jean Rochefort. Tous ces gens là moi je les adore, ils ont baigné mon enfance de petit cinéphile et j’ai trouvé que tout cela était réuni dans la pièce qu’Emmanuelle a eu l’idée d’écrire.

C’est sa deuxième pièce puisqu’elle avait écrit précédemment un spectacle jeune public  «Cendrillon bottée au bois dormant», c’était une superbe idée, tous les contes se mélangeaient.

Après un très beau succès à Paris «La croisière ça use !» va maintenant partir en tournée.

 

Vous avez aussi des pièces qui tournent ?

Oui j’ai des tournées en France, en Belgique, en Suisse, au Luxembourg pour ma société qui s’appelle «Ça se joue», j’emmène les spectacles du Théâtre d’Edgar en tournée mais je crée aussi des spectacles pour la tournée. En ce moment j’ai en tournée Bernard Menez dans «À vos souhaits», Didier Gustin dans «Bon pour accord», le seul en scène de Philippe Chevalier que j’ai produit ici pendant quatre vingt dix représentations la saison dernière. J’ai le spectacle jeune public «Le royaume des chansons», j’ai «Tinder surprise» qui sont aussi à l’affiche du théâtre. Et en septembre, j’aurai un Feydeau avec Tex qui était au Théâtre Rive Gauche dans «Monsieur Nounou.»

 

Retour vers les voix

Je suis devenu une voix célèbre dans le doublage. J’ai doublé Marty Mcfly dans «Retour vers le futur» en 85, le deux et le trois en 87, Amadéus Mozart dans le film «Amadéus» en 83, et j’ai été choisi par Bob Zénékis le réalisateur pour doubler le lapin dans Roger Rabbit donc je suis Roger Rabbit.

Je fais encore un peu de doublage mais très peu, je ne double que les deux personnages dont j’ai la voix attitrée, c’est Mickaël J Fox/Marty Mcfly et là actuellement je double une série avec mon personnage de Brandon dans «Beverly Hills». Il est dans une nouvelle série qui s’appelle «Private Eyes» et TF1 a souhaité que ce soit la même personne qui le double, ce sont deux personnages qui mènent des enquêtes, c’est une série familiale très sympa. Dans ce cas là, j’accepte sinon je n’ai pas le temps et je dirai que j’ai fait le tour du doublage. J’adore ça mais entre un compositeur célèbre, un lapin … je crois que j’ai fait le tour des personnages. Pour moi c’est un excellent souvenir mais c’est du passé.

 

Mais qui est Luq Hamett?

Je suis né au Havre le premier avril 1963 sous le signe de la farce à Sainte Adresse puisque à l’époque tous les enfants de ma génération sont nés à Sainte Adresse. J’ai fait toute ma scolarité là-bas et j’y ai fait mes premiers spectacles. À l’époque Le Havre était une ville communiste, il y avait beaucoup de subventions pour la culture, nous avions quatorze salles de spectacles, une par quartier, qui s’appelaient les CLEC (centres de loisirs et d’échanges culturels).

J’ai commencé à faire mes «one man show» à quinze ans, je n’ai jamais été un grand fan de l’école, j’ai écrit mon premier sketch en cours de maths. J’avais seize ans lorsqu’un acteur est venu de Paris roder son spectacle au Havre, c’était Roland Magdane qui m’a invité à faire sa première partie. Roland avait bien connu Le Havre parce que toute la troupe de Fugain était restée des mois en résidence pour faire un énorme spectacle au mois de juin, c’était «Juin dans la rue».

Quelques mois après j’ai eu mon bac en ballottage défavorable, je l’ai eu au second tour, bac littéraire bien sûr A, et je suis parti à Paris. Grâce à Roland j’ai rencontré un producteur dont je suis devenu l’assistant, j’ai connu l’envers du décor, j’étais dans une production de publicité radio et télévision où j’ai connu les acteurs qui faisaient les voix, c’est comme cela que je suis rentré dans cet univers voix. En 83, j’ai fait une audition au Point Virgule et j’ai été retenu, j’y suis resté trois ans, cela a été un énorme succès, cela s’appelait «Moi je craque, mes parents raquent».

Ce «One man show»  m’a propulsé dans le métier. J’ai commencé à faire du doublage, des dessins animés, je suis rentré à la télévision, Jacqueline Joubert était venue voir mon One et je suis devenu un des membres de Récréa 2. Quelques années après j’ai eu mon émission de 90 à 96 qui s’appelait Hanna Barbera dingue dong, toute la génération des trente cinq/quarante ans connaissent, j’ai été leur animateur jeunesse pendant six ans. C’était une heure de dessins animés d’Hanna Barbera, Hanna et Barbera sont les noms des deux créateurs de ce studio de dessins animés américains, c’est à dire «Les Pierres à feu, Scoubidoo, Les fous du volant, Satanas et Diabolo …»

Parallèlement à cela, je faisais du théâtre et beaucoup de doublage.

Ces trois dernières années, je me suis complètement investi dans le Théâtre d’Edgar mais cela commence à me démanger, cela veut dire que j’ai envie de refaire de la scène, pas forcément chez moi d’ailleurs. Je ne suis pas sûr que ce soit bien de jouer chez soi, si l’occasion se présente, je le ferai mais je suis ouvert aux propositions et là vraiment cela fait quatre ans que je n’ai pas joué et cela commence à me manquer.

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Par Maryline Bart, le .

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