Comédie de Caen
1 Square du Théâtre
14200 Hérouville-Saint-Clair
02 31 46 27 29
Les 1er et 2 mars 2018 à 20h
Et du 13 au 25 mars 2018 au Théâtre de Paris (9ème)
Lors de deux soirées, la Comédie de Caen programmait Vera de Petr Zelenka, une version pour la scène de Pierre Notte, traduite en français par Alena Sluneckova.
Pour fuir sa condition qu’elle juge médiocre, Vera adhère aux principes d’une société dans laquelle la course à une consommation effrénée et forcenée est de rigueur, une façon de prendre une revanche sur le monde d’avant 1989, à Prague. Elle apprendra à ses dépens que dans la jungle de la sphère artistique, dans la jungle du capitalisme, il ne faut pas oublier qu’il y a toujours un requin pour dévorer un poisson, si gros soit-il.
Vera est devenue une puissante directrice de casting qui possède le pouvoir et en use à outrance, impitoyable et cruelle, sans foi ni loi, écrasant tout sur son passage. Elle fait la pluie et le beau temps sur les plateaux de tournage dans un milieu où les égos surdimensionnées gangrènent les relations au travail, familiales et intimes.
Nous sommes témoins de l’ascension vertigineuse de cette femme et assistons à sa chute qui le sera tout autant lorsqu’elle se retrouve dépossédée de ce pourquoi elle vivait. Elle dégringole jusqu’à se retrouver sans domicile fixe, un plongeon qui cependant n’entame pas complètement sa morgue, au plus profond de sa déchéance, elle réussit à tirer satisfaction d’une scène où elle bascule dans sa fange mais qui lui permet de faire le buzz. Tout plutôt que l’anonymat ?
La pièce dénonce une satire aussi féroce que cocasse de notre société, usant pour cela d’effets cinématographiques, utilisant de nombreuses séquences et ellipses pour une mise en scène alerte, mordante et tellement lucide. La projection de photos de Vera enfant, innocente et attendrissante fillette donne encore plus de force à la noirceur de Vera devenue Cruella. Pour se prémunir du pathos, les séquences pub et intermèdes chantées ne manquent pas de piquant et donnent un peu de légèreté. Saluons la trouvaille scénique de l’ascenseur omniprésent, témoin de l’ascension et la décadence, qui rythme les différents épisodes de sa vie
Pendant deux heure nous assistons à une performance époustouflante de Karin Viard qui explose dans toutes les facettes de son rôle. Magistrale dans cette créature insupportable en jupe et talons hauts, elle excelle plus encore dépenaillée en survêtement, fort bien accompagnée par les comédiens qui l’entourent avec brio dans un jeu rythmé et frénétique enchainant les métamorphoses avec perruques et vêtements pour donner corps à une vingtaine de personnages.
C’est une pièce qui bouscule et c’est tant mieux. Saluons une nouvelle fois la prouesse des comédiens et la brillante mise en scène.
de Petr Zelenka
Traduction Alena Sluneckova
Version pour la scène de Pierre Notte
Mise en scène Élise Vigier et Marcial Di Fonzo Bo
assistés d’Alexis Lameda-Waksmann
Avec Karin Viard, Helena Noguerra, Lou Valentini, Rodolfo De Souza, Pierre Maillet, Marcial Di Fonzo Bo
Scénographie Marc Lainé et Stephan Zimmerli
Lumières Bruno Marsol
Son Manu Léonard
Costumes Anne Schotte
Perruques Cécile Kretschmar
Films réalisés par Nicolas Mesdom
Vidéo Romain Tanguy et Quentin Vigier
Chanson de Vera, paroles et musique Pierre Notte arrangements Étienne Bonhomme
Décor construit par les ateliers de la Comédie de Caen