Non, je n'irai pas chez le psy !
Théâtre de la Tache d’Encre
1 rue de la Tarasque
84000 Avignon
04 90 85 97 13
À 17h00
Que dire du spectacle de Manon Lepomme ? Qu’elle nous parle de sa vie quotidienne, de son chéri, de ses grands parents, de son péché mignon. Qu’elle est déjantée, excessive, non ! Excessivement drôle et tendre par contre et que l’on rit aux larmes du début jusqu’à la fin de ses bons mots, de ses répliques savoureuses.
Il est quasi-impossible de résumer ce spectacle, de parler de l’énergie débordante et le dynamisme époustouflant de Manon. Comment en savoir plus ?
Il est simplement indispensable de prescrire ce spectacle pour ensuite dire comme elle : « Non, je n’irai pas chez le psy ». Et découvrir l’entretien qu’elle nous a accordé, un entretien entrecoupé d’éclats de rires, dans lequel elle se livre avec tout son naturel.
Bonjour Manon, c’est comment Avignon ?
Eh bien Avignon, c’est déjà épuisant normalement mais là Avignon, fracturée, c’est encore plus épuisant mais c’est un Avignon complètement dingue car c’est complet depuis le premier jour, et ça je ne me l’explique pas. Je l’ai avec une plus grosse équipe, c’est un spectacle qui déjà en Belgique fonctionne beaucoup mieux que le premier parce que je pense qu’il est beaucoup plus dans l’air du temps, beaucoup plus personnel, plus sincère et drôle que l’autre, même si ce sont des spectacles très différents.
Pourquoi l’écriture de ce spectacle ?
Pourquoi l’écriture de ce spectacle ? Déjà parce dans le premier j’avais repris des textes de pleins d’auteurs, cela allait du La Fontaine à du Desproges… il y avait plein d’auteurs et là j’avais envie de parler de thèmes qui me touchaient avec mes mots à moi. Mais quand j’ai commencé à écrire seule, ça a été une catastrophe, j’avais plein d’idées dans la tête mais je n’arrivais jamais à les sortir. J’ai fait appel à Marc Andreini qui est un auteur liégeois, de ma ville, qui a travaillé avec beaucoup de personnes différentes et qui s’adapte à chacune, et donc on a travaillé ensemble pendant neuf mois. Au début, j’arrivais juste avec des idées et puis on en parlait tous les deux et, plus on avançait, plus vraiment j’écrivais des choses et on modifiait ensemble.
Donc on a écrit ce spectacle, mis en scène par Matthieu Debaty, un autre liégeois, je voulais vraiment quelqu’un qui me connaisse bien, autant à la vie qu’à la scène et c’est le cas de Matthieu, parce qu’ il est comédien à la base et on travaille ensemble dans un autre projet. C’est quelqu’un de très exigeant et j’avais envie de ça, quelqu’un qui me fasse recommencer et qui me fasse aller au bout des choses.
J’ai commencé à jouer d’octobre à juin, jusqu’à Avignon, il venait régulièrement débriefer, on faisait des réunions, c’est dommage qu’il n’ait pas pu venir voir cette mise en scène en chaise roulante.
Voilà pourquoi ce spectacle, j’avais vraiment envie de parler de choses qui me tenaient à cœur, notamment l’Alzheimer de mes grands parents, le fait que les femmes soient obligées d’avoir un certain physique. Moi dans le spectacle, je dis que je m’en fous de mon physique mais c’est complètement faux, tout comme beaucoup de femmes mais j’adore tellement manger. je ne peux pas m’empêcher de manger, et c’est tout le paradoxe du personnage comme on l’est dans la vie, on n’est jamais 100% cohérents.
Je pense que c’est un spectacle qui fonctionne car c’est un spectacle, je dirais plus que sincère, c’est un spectacle honnête. Les gens quand ils sortent ils me disent : c’est super car on a l’impression que vous êtes un peu comme ça dans la vie.
Je suis comme ça dans la vie.
Je crois que les gens sont touchés dans les différents thèmes que j’aborde parce qu’ils s’y retrouvent, peu importe l’âge d’ailleurs. Et voilà, il y a eu une espèce de magie pour plein de raisons, pas qu’à cause du plâtre. je ne pense pas que le succès du festival ne soit dû qu’à ça, mais il y a beaucoup de gens qui le pensent.
Alors qui est Manon Lepomme ?
Manon Lepomme c’est moi, comédienne de 28 ans. de formation je suis politologue, mes écoles en théâtre je les ai faites depuis que j’ai sept ans dans ce qu’on appelle les académies en Belgique, des écoles où après les cours on va faire du théâtre, de la diction, de la déclamation, de l’art dramatique… J’ai commencé à sept ans et puis j’ai continué.
Alors, qui suis- je ? Je suis une jeune femme très angoissée, je suis très passionnée, j’adore ce que je fais, j’adore la scène et je n’en suis jamais rassasiée. J’ai tout le temps envie de jouer, d’essayer de nouvelles choses, faire de nouveaux projets et puis je suis un peu dans l’air du temps des femmes qui ont des choses à dire et qui le disent bien bien fort. C’est hors de question que l’on soit l’égale de l’homme, ce serait trop peu ambitieux. Je ne suis pas spécialement une féministe, je défends la place de la femme et j’estime que c’est important d’être une femme sur scène mais je ne suis pas une femen.
Vous avez des projets ensuite ?
Le projet après Avignon c’est de partir en vacances sans plâtre, c’est le gros projet (petite précision, Manon a glissé sur son paillasson quelques jours avant le festival et s’est fracturée la malléole, elle a donc fait le festival avec fauteuil roulant et béquilles).
Et puis je sais que je passe bien à la radio car je l’ai déjà fait mais maintenant il faut que je trouve qu’y faire, car ce n’est plus comme il y a vingt ans, on n’arrive plus avec une voix en disant que voulez vous que je fasse ? Maintenant il faut un concept et une idée car les chroniques politiques je n’ai pas du tout envie de faire ça, en tout cas pour le moment et puis pour le reste, je me rends compte que je n’ai pas beaucoup de temps. Moi je ne suis pas très impatiente, cela se construit petit à petit.
Un autre Avignon en 2018 ?
Ah oui ça c’est sûr, je suis en train de regarder les salles pour l’année prochaine. Oui oui sans aucun doute, avec une salle plus grande et puis il y aura encore des choses à améliorer mais en tout cas, on a de très belles leçons à tirer de cet Avignon ci.
Et ce plâtre, vous l’avez géré comment ?
C’est un fameux challenge, quand j’ai été plâtrée le 1er juillet, j’ai vraiment pleuré de rage et de tristesse, plus que de douleur même si c’est extrêmement douloureux, je me suis dit : comment je vais faire, je ne vais pas y arriver. Et puis mon co-auteur m’a dit : « Écoute oui cela va être compliqué mais ce n’est pas une vertèbre, si c’était une vertèbre, tu devrais rester dans ton lit. » On a relevé ce défi et je me suis rendue compte alors qu’une équipe, c’est vraiment très important. On ne peut rien faire seule et là l’expérience l’a vraiment montré.
C’est une grosse leçon de l’avoir jouer ainsi et cela a démontré mon envie de jouer, quoi qu’il advienne je joue. Parce que j’adore ça, qu’il est hors de question d’abandonner ce rêve. Je crois que cela va me donner d’autant plus confiance en moi, cela prouve que tout est possible et cela peut prouver aussi à beaucoup de personnes qui se plaignent souvent que beaucoup de choses ne dépendent que de soi. C’est une question d’envie et d’équipe car s’il n’y avait pas eu cette équipe, ce n’était pas possible, tout le monde s’est mobilisé vu que moi j’étais immobilisée.
C’est aussi cette énergie qui ressort dans le spectacle.
Oui je crois, cela n’empêche pas que j’ai pleuré trois ou quatre fois mais c’est cette énergie qui me caractérise depuis toujours même si je dois la tempérer parfois .
Quand j’entends les gens parfois dans le public dire, mais elle est complètement cinglée ! Cela me fait tellement rire !
Donc c’est bien je suis contente et le retour des personnes lambda tant que des professionnels est très bon. Je suis ravie.
Mais Avignon cela reste un truc de fous.